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L’ « Orateur » de l’Antiquité

La tradition le retiendra comme le plus grand des orateurs attiques, ces grecs dont la voix faisait frémir les peuples et infléchir la politique des cités antiques.

Né à Athènes en 384 av. J.-C., mort à Calaurie en 322 av. J.-C., il a été l’un des hommes d’État le plus influent d’Athènes. C’était un partisan convaincu de l’indépendance et du renouveau de la cité d’Athéna face aux deux géants dominant le nord et l’est du monde grec : la Macédoine de Philippe II  et la Perse d’Artaxerxès III.
Incroyable vie et fertile postérité, n’est-ce pas ? Et pourtant Démosthène n’était pas vraiment bien parti.

Le vilain petit canard

Fils de citoyen, il est orphelin de père dès ses sept ans. Les tuteurs de Démosthène, des cousins et un oncle, profitent largement des biens du jeune garçon décrit comme malingre, faible de souffle et affecté de multiples défauts de prononciation. Pas génial pour un orateur en herbe ! Si à vingt ans, il gagne le procès qu’il intente à ses tuteurs un peu trop gourmands, ses premières allocutions publiques sont marquées par les huées et les rires tant il paraît maladroit.

Une vocation, ça se travaille

En entendant à 15 ans un plaidoyer au tribunal, Démosthène est convaincu de la puissance de la parole. Il se forme pour devenir logographe, écrivain de discours. Un bon choix de carrière dans une Cité où la vie politique et judiciaire repose essentiellement sur la parole.

Les écrivains antiques sont friands d’anecdotes. Les biographies de Démosthène en regorgent. Ainsi il aurait été un véritable athlète de la parole, s’entrainant jour et nuit.
On peut lire qu’il corrigeait ses défauts d’élocution en parlant avec des cailloux dans la bouche, qu’il renforçait sa voix en déclamant en bord de mer ou en gravissant des côtes, qu’il s’entraînait devant un grand miroir ou sous une épée pendue au plafond pour éradiquer ses mauvaises habitudes gestuelles, qu’il travaillait ses discours beaucoup plus minutieusement que ses contemporains, ce jusqu’à ses cinquante ans.

C’est toujours autour des grands hommes que naissent les imaginaires les plus divers. Authentiques ou non, ces anecdotes montrent à quel point la figure de Démosthène a marqué ses contemporains et ses héritiers.

Bête de scène, requin politique 

Dans l’Athènes antique, si l’on parle bien, on a le pouvoir ! Démosthène s’impose par son éloquence à partir de ses trente ans. Ses nombreux discours qui nous parviennent écrits témoignent d’un style travaillé et très vivant.

Intégralement au service de la politique et des causes judiciaires, les discours de Démosthène sont profondément partisans. Ses discours les plus fameux, les Philippiques, ont surtout transmis de lui l’image du partisan acharné de l’indépendance d’une démocratie athénienne à bout de souffle face aux appétits de Philippe II de Macédoine.

Échec d’une cause, succès d’une voix

Ses exhortations et son influence n’empêchent pas la mort de la Grèce des cités à la bataille de Chéronée, en -338. Ce qui naît pourtant à sa mort en exil à Calaurie, en -322, c’est une figure intemporelle d’engagement, de talent et de fougue oratoire, reprise en de multiples occasions pour servir des causes diverses (la IIIème République, la Résistance, le gaullisme…). A travers les siècles, la voix de Démosthène résonne toujours.

Intéressés ? Voilà des sources !

Vie de Démosthène selon Plutarque, trad. RICARD, Lefèvre & Charpentier, Paris, 1844 (site de Philippe Remacle): https://remacle.org/bloodwolf/historiens/Plutarque/viedixorat.htm

Œuvres de Démosthène (site de Philippe Remacle) : https://remacle.org/bloodwolf/orateurs/demosthene/table.htm

Interprétation de la vie de Démosthène selon ses handicaps : GARDOU Charles, “Démosthène, de l’enfant bègue à l’orateur en puissance”, in Reliance, n°15, 2005, p.101 à 107 (https://www.cairn.info/revue-reliance-2005-1-page-101.htm#no5 )